80 % des Français auront mal au dos un jour (ameli.fr). Le mal de dos est la principale cause d’arrêt de travail. Cela représente 2,3 milliards d’euros dépensés par les autorités de santé par an et c’est le deuxième motif de consultation chez le médecin généraliste.
C’est énorme ! Pourquoi ces chiffres sont aussi élevés ? Pourquoi la majorité des gens souffrent du dos alors que le dos est anatomiquement fait pour être solide ? Y a-t-il une cause unique ? Est-ce que la sédentarité et le manque de mouvement pourrait expliquer ses chiffres ? Est-ce que les sportifs ont mal au dos ? Et les jeunes ? Quel est le facteur déclencheur de la douleur ?
Mal du siècle ?
Au Moyen Âge, on pensait que les sorcières infligeaient des maladies aux humains en tirant des flèches. Le terme « hexenschuss » signifie lumbago en allemand et littéralement : coup ( tour) de sorcière. C’est effectivement ce que l’on peut ressentir lorsque la douleur survient d’un coup sans prévenir.
Au Moyen Âge le lumbago était déjà connu et traité avec des manipulations vertébrales ( sofmmoo.org : histoire du mal de dos), mais il est difficile de trouver des écrits et des chiffres à ce sujet et nous manquons d’éléments de comparaisons quantifiables d’un siècle à l’autre.

Mais au milieu du XXe siècle, la France était un pays rural dans lequel l’effort faisait partie du quotidien. Le corps était formé pour l’activité physique et la plupart des métiers avaient une importante composante physique (manutention, marche….)
Or depuis 1950 , il y a une vraie rupture dans nos habitudes de vie avec l’arrivée des moyens de transports mécanisés et du confort moderne. C’est ce qui a participé à nous rendre plus sédentaires qu’avant : voiture, télévision, écrans contribuent à nous maintenir dans la posture assise trop longtemps ( sédentaire vient du latin sedere : être assis). On marche moins, on porte moins et moins lourd… bref, nous sommes moins actifs physiquement ce qui affaiblit les muscles, tendons, ligaments qui soutiennent le dos. Et les articulations supporte donc moins bien un effort important.
« Un des points-clés de la lombalgie consiste à utiliser sa colonne vertébrale de façon adéquate : sans solliciter trop un segment par rapport à un autre… Cette démarche n’est pas innée ; elle résulte d’un apprentissage progressif qui commence dès l’enfance… La sédentarité fait que l’expérimentation est insuffisamment développée. » (lombalgie.fr : Cause de la lombalgie : sédentarité)
C’est ce que nous disent les kinésithérapeutes aujourd’hui, comme Major Mouvement dans son livre 10 clés pour un corps en bonne santé : « la raison pour laquelle le mal de dos est devenu le mal du siècle, c’est parce qu’on ne l’utilise pas assez et que, de ce fait, il s’affaiblit. Et si on arrêtait de vouloir le protéger ? Le dos est fort, il peut et doit bouger, il peut porter, il doit porter ! »
Et oui ! Le corps est fait pour bouger et la sédentarité peut favoriser l’apparition de douleurs dorsales notamment lors de mouvements qui nous obligent à sortir de notre zone de confort, lors de mouvements inhabituels. Moins nous bougeons, plus la zone de confort s’amenuise.
Entretenir son dos
Le sport régulier est donc un bon moyen d’entretenir un dos en bonne santé et le corps en général. Mais aussi les efforts quotidiens : la marche, monter les escaliers, faire du vélo, jouer avec les enfants, bricoler, jardiner… L’activité physique est favorable en préventif et aussi en curatif. « Mal de dos : le bon traitement c’est le mouvement » confirme la campagne de prévention de l’assurance maladie.

Il faut donc rester actifs pour ne pas avoir mal au dos, mais est-ce suffisant ? Les sportifs n’ont-t-il jamais mal au dos ? Et les métiers dans lesquels les contraintes de charges sont nombreuses ?
« Dans une consultation de médecine générale, la cause de la lombalgie est non spécifique dans la majorité des cas, environ 85 %… c’est la lombalgie commune » (Cf. : lombalgie aiguë, Étude des Hôpitaux Universitaires de Genève). La lombalgie commune guérit en moins de 6 semaines dans 90% des cas.
On dit souvent que porter des charges lourdes peut provoquer une lombalgie ou un lumbago. Mais la colonne vertébrale peut subir de grandes contraintes en compression sous réserve d’être bien entraînée et preparée.

Qu’en est-des athlètes haltérophiles ? «Sur 6 années, Calhoon G, et Frey AC. ont observé un taux de blessure de 3,3 pour 1000 heures d’entraînement chez ces athlètes. Les absences à l’entraînement pour cause de blessure au niveau du bas du dos ont duré moins d’une journée dans 87,3 % des cas et moins d’une semaine pour les autres. » La technique et le renforcement adéquat permettent de minimiser les risques de blessures même en portant des poids lourds.
Toutefois, porter une charge lourde de façon répétitive sans entraînement ou sans préparation adéquate est facteur de risque pour le dos.
Ainsi un rapport de l’INSERM rapporte que les groupes professionnels astreints à des activités physiquement exigeantes comme les ouvriers du BTP ou de l’industrie, les manutentionnaires, mais surtout le personnel hospitalier, développent entre 52 et 64% plus de rachialgies que la normale.
D’où l’importance de la prévention et de la formation sur les bon gestes et les positions ergonomiques dans ces métiers pénibles physiquement.
Issue du milieu sportif, ce que j’ai pu observer aussi, c’est que les douleurs dorsales peuvent survenir lorsqu’on concentre l’effort sur certains groupes musculaires au détriment d’autres. Dans l’exercice d’un sport, on effectue souvent les mêmes gestes et certains groupes musculaires finissent par être délaissés. Par exemple, le tennis est un sport asymétrique avec des flexions et extensions d’un même groupe de muscles accompagnée de rotation de la colonne vertébrale. Cela peut engendrer un déséquilibre musculaire et occasionner des douleurs.
Par ailleurs, le renforcement à lui seul ne suffit pas : étirements, mobilité et travail sur la proprioception contribuent à la bonne santé du dos. D’où l’importance de faire quelques exercices de « gym » ou de préparation physique même quand on pratique un sport. Et cela peut se faire de manière simple et rapide sous forme de routine de quelques minutes.
Le professeur Saillant nous dit qu’il doit y avoir un équilibre à respecter entre la stabilité et la mobilité du rachis. L’excès de l’un pouvant agir négativement sur l’autre (Kapangji préface).
Corps/esprit indissociables pour le dos :
Mais l’aspect purement physique n’est parfois pas le seul déclencheur de maux de dos. Les témoignages sont nombreux sur l’importance des facteurs psychosociaux sur notre santé en général et sur le dos.
Une étude de l’INSERM évoque notamment un lien entre stress au travail et problèmes de dos.
« Un certain nombre d’études transversales mettre en évidence une association significative entre travail monotone et plaintes pour lombalgie… Deux études longitudinales ont mis en évidence un lien de causalité entre contrainte de temps et apparition de cervicalgies. »
Contrainte de temps, charge mentale au travail, poids des responsabilités… sont facteurs de stress et se traduisent par de l’anxiété, des états de tension, de la fatigue et augmentent la tension des muscles et la fatigue musculaire, au niveau de l’ensemble du rachis. Notre état psychologique influence nos postures et positions. Le corps adopte une attitude de repli, de fermeture et de tension en cas de stress. Cela se fait souvent inconsciemment et favorise une prédisposition aux maux de dos.
Le corps et l’esprit sont indissociables !

Des douleurs trans-générationelles :
Peut-on affirmer que nous avons davantage mal au dos parce que la population est vieillissante ? Non ! Car il semblerait que l’âge ne soit pas un facteur déclenchant des rachialgies.
« Le pic de déclaration du premier épisode douloureux se situerait entre 20 et 30 ans… Cette précocité empêche de considérer les lombalgies comme une pathologie strictement dégénérative… » affirme un rapport de l’INSERM sur les rachialgies. Les problèmes de dos ne sont pas le privilège des adultes et peuvent se déclarer dès huit ans.«
Et l’étude ci-dessous nous montre que toutes les tranches d’âge sont touchées par les lombalgies avec sensiblement le même pourcentage.
En définitive, les seniors ne sont pas plus touchés par les lombalgies que les jeunes !

En résumé, les causes des maux de dos sont diverses et dépendent de multiples facteurs (anxiété, stress, qualité du sommeil,tabagisme…). Sans oublier les lombalgies spécifiques qui peuvent être dues à des traumatismes (choc, accident), rhumatismes inflammatoires, infection, pathologies dégénératives ou mécaniques… Il n’y a pas UN mal de dos mais DES maux de dos.
Face à cette véritable « épidémie », il vaut mieux prévenir que guérir. Et le mouvement, l’activité physique adaptée, sont les meilleurs moyens de préserver le dos et de l’entretenir. Quel sport choisir ? Celui qui vous plaît sera le meilleur ! Le corps est fait pour bouger. Rendons-lui justice !
Nb. :Cet article est à caractère informatif. Pour tout problème de dos, consulter en priorité un professionnel du milieu médical : médecin , kinésithérapeute ou/et ostéopathe.
Nb. 2 : Cet article est écrit par une professionnelle du sport à partir de publications de médecins, de centre de recherche médicale, de kinésithérapeutes, de scientifiques.
Sources :
– INSERM : « synthèse rachialgie 1995 »
– Hôpitaux Universitaires de Genève : « lombalgie aiguë »
– L’Assurance Maladie : « je souffre de lombalgie : de quoi s’agit-il et que faire »
-Major Mouvement : « 10 clés pour un corps en bonne santé »
– Sciences du sport.com : « le squat complet : Amicalement vôtre ? »
– Instagram @touchofscience : « Mythe : j’ai mal parce que je suis vieux »
-Lombalgie.fr : « causes de la lombalgie :la sédentarité »